Des petits bijoux de chocolaterie et de pâtisserie au cœur d'Anvers
En visite chez DelReY
Au coin de l'Appelmansstraat, au cœur du quartier des diamantaires d'Anvers, ce ne sont pas les pierres qui brillent le plus. Les vitrines de DelReY ressemblent à celles d'un bijoutier, mais les bijoux en question sont bien plus gourmands et fabriqués par l'équipe du propriétaire, chocolatier et pâtissier Bernard Proot. L'actuelle chocolaterie-pâtisserie artisanale peut se targuer d'une solide expérience étalée sur 75 ans d'histoire, dont la propriétaire Anne Seutin parle d'ailleurs dans son livre publié cette année ('Klein én fijn').
Une longue histoire
Le chocolatier-pâtissier Bernard Proot et son épouse Anne Seutin sont aujourd'hui propriétaires de DelReY depuis 41 ans, mais plusieurs propriétaires les ont précédés.
Une histoire d'acquisitions
L'histoire de DelReY commence avec "Monsieur Faustin", qui possédait environ sept magasins à Anvers. Sa femme, Adèle Raymakers, exploitait la chocolaterie située au 5 Appelmansstraat. Le couple s'est séparé à un moment donné, après quoi Adèle a poursuivi l'activité avec le chef.
La Maison DelReY (nom composé des dernières lettres de son prénom et des premières lettres de son nom de famille) a prospéré dans le quartier du Diamant qui était le centre d'Anvers. À l'époque, les nombreux cinémas ne disposaient que de peu de services de restauration. La boutique restait donc ouverte jusqu'à 21 heures afin que les cinéphiles puissent d'abord y acheter leurs délicieuses provisions.
Adèle Raymakers a eu deux filles, mais a finalement décidé de laisser l'entreprise à un ancien employé. Arnout Marchand avait travaillé chez DelReY et, ayant acquis une grande expérience professionnelle en Suisse, il a saisi l'occasion de racheter son ancien employeur. Arnout et Rita ont développé la chocolaterie, en particulier dans le domaine des chocolats et des biscuits.
Bernard Proot a rejoint l'aventure DelReY en 1976. Au départ, il travaillait pendant la haute saison, mais lorsque les propriétaires sans enfants ont ouvert une entreprise à l'étranger, Bernard s'est vu confier davantage de responsabilités. Pendant la saison estivale, Arnout et Rita s'occupaient de leur entreprise à l'étranger, laissant Bernard gérer l'entreprise à Anvers. En 1983, les propriétaires de l'époque ont décidé de céder l'entreprise et Bernard l'a reprise avec sa femme Anne Seutin.
Une entreprise familiale grâce à la pâtisserie
"Avant les projets de reprise, Bernard et moi souhaitions également acheter une voiture", explique Anne Seutin. "Comme Bernard avait déjà acquis une grande expérience en tant que pâtissier, nous avons commencé à faire des gâteaux le week-end. Nous les proposions dans différents restaurants. Arnaud s'est dit que nous pourrions aussi vendre ces gâteaux dans son magasin. À l'époque, il y avait une affiche qui indiquait les gâteaux qui seraient faits le week-end suivant, de sorte que les clients pouvaient commander à l'avance. Cela a très bien fonctionné, mais nous n'avons finalement pas acheté de voiture. Les fonds économisés ont été mieux utilisés lorsque nous avons repris l'entreprise. Après la reprise, la pâtisserie a également été intégrée à l'offre quotidienne du magasin."
Bernard Proot et Anne Seutin ont quatre enfants, dont les deux plus jeunes ont rejoint l'entreprise. "Nous avons toujours pensé qu'il fallait faire ce que l'on aime dans la vie. Nos deux filles aînées ont suivi leurs propres passions, mais Jan et Julie ont été séduites par l'entreprise. Jan - chocolatier - s'occupe de l'aspect opérationnel de l'entreprise; Julie se concentre davantage sur l'administration, les contacts B2B, le marketing et la communication. L'avenir de l'entreprise familiale est donc d'ores et déjà assuré."
SMALL AND PRECIOUS: TOUTE UNE HISTOIRE!
La riche histoire de DelReY a donné l'envie à Anne Seutin d'écrire un livre à l'occasion du 75e anniversaire de la maison. "Le livre contient 75 faits sur les 75 ans de DelReY et est parsemé de jolies photos historiques d'Anvers et du magasin", explique l'auteure. "Il contient également des témoignages de fans connus et moins connus de DelReY et une douzaine de recettes de nos maîtres pâtissiers et chocolatiers."
Ils ont également pu présenter le livre à l'hôtel de ville au bourgmestre et à l'échevin de la classe moyenne d'Anvers. "Nous avons estimé qu'il était important de mettre en valeur l'histoire du magasin et de la ville de cette manière. À l'époque, nous avons également plaidé en faveur d'un soutien accru à cette importante classe moyenne. Les magasins de spécialités artisanales comme le nôtre ne doivent pas disparaître." Le livre est disponible directement chez DelReY et dans ses points de vente.
Un pâtissier de haut vol
L'inclusion de la pâtisserie dans l'offre de DelReY a été un succès. Ce segment s'est développé si rapidement qu'il a fallu chercher des renforts. Ce renfort est venu en 1995, lorsque DelReY a engagé Gunther Van Essche. Ce grand pâtissier avait remporté la Coupe du Monde (Lyon) la même année - au sein de la première et unique équipe belge - avec ses coéquipiers Pierre Marcolini et Rik de Baere.
"Gunther est un formidable esprit créatif, qui sait aussi transformer rapidement les idées en réalité", explique Bernard Proot. "Notre chance, c'est qu'il veut rester loin de la bureaucratie et de la gestion d'entreprise. En tant qu'employé, il peut s'adonner à ses activités créatives en toute quiétude. C'est une situation gagnante pour nous et pour lui. Et aussi pour notre fils Jan, qui a appris toutes les ficelles du métier auprès de Gunther lorsqu'il a rejoint l'entreprise en 2008."
Le gâteau caribéen avec lequel M. Van Essche a triomphé est toujours disponible chez DelReY. La recette - qui ne s'adresse pas aux débutants! - se trouve d'ailleurs dans le livre sur les 75 ans de DelReY.
Chocolate Lounge
Le magasin de la Appelmansstraat accueille également le "Chocolate Lounge" où l'on peut aujourd'hui prendre un petit déjeuner, mais surtout savourer les délices que DelReY propose sur le comptoir du magasin. Le salon a lui aussi une longue histoire.
"Lorsque nous avons repris l'affaire, les clients étaient souvent déjà dans la boutique en train de déguster les chocolats ou même les gâteaux qu'ils avaient achetés", se souvient Anne. "Je n'aimais pas cela et lorsqu'un restaurant situé dans la maison voisine a été mis en vente, nous nous sommes lancés. Au départ, il s'agissait d'un salon de thé, où l'on ne trouvait que des sucreries. Mais bien sûr, les gens ne venaient qu'après 14 heures, laissant cet espace vide pendant une partie de la journée.... La solution logique était aussi la meilleure: nous avons également proposé un déjeuner. Un ami cuisinier a préparé un menu limité avec quelques recettes simples, de sorte que nous pouvions également satisfaire les envies de salé."
L'espace lounge a souffert de la crise du Covid, tout comme DelReY lui-même. "Comme nous étions encore ouverts en tant que magasin d'alimentation, nous nous sommes rabattus sur des mesures de soutien très limitées. Dans notre segment de luxe, nous n'avons pas de clients quotidiens et, en raison d'une approche stricte du gouverneur d'Anvers, les réunions et le catering étaient encore plus fermés que dans d'autres endroits du pays. En conséquence, le salon a perdu la quasi-totalité de son personnel. Pendant cette période, nous avons tout revu et, avec un business plan remanié, le salon a rouvert ses portes en mai 2024."
"Nous constatons que les choses reprennent progressivement, mais nous remarquons que notre public international n'est pas encore assez informé du fait que nous sommes à nouveau ouverts. Ils viennent souvent pour un week-end en ville et la visite de notre magasin et de notre salon fait partie de leur séjour", explique Bernard. "Nous pensons que la réouverture du salon est importante pour l'expérience et la fidélité des clients. Le salon de thé et la boutique se renforcent mutuellement."
Extension bien méritée
Les lecteurs attentifs ont déjà pu constater qu'au départ, le Chocolate Lounge n'était pas adjacent à la boutique. Il y avait un autre magasin de vêtements entre les deux. Bien entendu, lorsque celui-ci a été mis en vente, une occasion unique s'est présentée.
"Avec ce magasin de vêtements entre les deux, les clients du salon devaient toujours sortir pour entrer dans le magasin et choisir leurs desserts", explique Anne. L'achat de cette propriété nous a permis de relier différents espaces entre eux. Avec les dernières rénovations en 2012, le rez-de-chaussée est aujourd'hui d'un seul tenant. Les clients du salon doivent d'abord passer par la boutique - où ils sont déjà momentanément enchantés par les gourmandises - pour se rendre au salon. Très souvent, en sortant, ils prennent aussi une friandise de la boutique."
En raison des différents bâtiments, les studios - au sous-sol et dans les étages - sont quelque peu séparés physiquement.
"En raison de la disposition des bâtiments, nous avons une certaine séparation entre les différents départements", explique également Bernard. "En soi, ce n'est évidemment pas un problème, mais il arrive souvent que chaque employé se retrouve un peu 'dans son coin'. Avec 12 personnes en production, il faut se concerter. Nous le faisons en équipe, mais aussi, par exemple, en numérisant les ordres de travail. Il y a des tablettes PC sur lesquelles chaque tâche est décrite avec précision, afin de limiter au maximum les pertes de matières premières."
L'école de l'apprentissage
Avec 12 employés à la production, quatre au salon, deux à l'entretien et environ sept au magasin, l'équipe de DelReY compte bientôt 25 personnes. Cela est nécessaire pour approvisionner le magasin, les différents points de vente et une activité d'exportation florissante au Japon. "Notre équipe est un bon mélange de jeunes forces et de professionnels expérimentés", se félicite Bernard. "Je sais qu'il n'est pas facile de trouver de bons collaborateurs de nos jours. Nous recevons beaucoup de demandes d'emploi, mais peu sont réellement qualifiées. Notre personnel est formé en interne dans l'atelier, mais nous nous attendons à ce que les connaissances et les compétences de base soient présentes de toute façon. Au fil des ans, nous avons déjà été un bon lieu d'apprentissage pour de nombreux professionnels qui ont ensuite créé leur propre entreprise avec succès."
Magasins spécialisés
Bernard Proot et Anne Seutin considèrent que l'avenir de DelReY est prometteur, deux enfants étant déjà en mesure d'assurer la succession. "Nous espérons qu'ils pourront poursuivre notre travail avec succès, en mettant l'accent sur la qualité, la créativité et le service", déclare le couple. "Nous sommes dans un créneau haut de gamme, pour lequel il y aura toujours un marché tant que l'on exigera un prix juste. L'avenir appartient aux magasins spécialisés comme le nôtre, mais les pouvoirs publics pourraient leur apporter un soutien plus important. Le réseau des détaillants flamands est important, y compris pour la société. Nous avons du mal à comprendre que nos métiers artisanaux puissent disparaître. Il y a suffisamment de développements technologiques aujourd'hui qui rendent l'artisanat plus facile - et plus attrayant."
En outre, Bernard et Anne voient également un défi dans les prix actuels du cacao. "Les prix montent en flèche, ce qui signifie que nous devons nous aussi les répercuter sur les consommateurs. Il est donc frustrant de constater que, dans les pays producteurs de cacao, tant de cacaoculteurs abandonnent parce qu'ils ne parviennent pas à garder la tête hors de l'eau. Plusieurs initiatives tentent aujourd'hui de remédier à cette situation, mais il faut espérer qu'il n'est pas trop tard."