L'électrification des véhicules de société accuse un retard pour la troisième année consécutive
L'électrification du marché des véhicules de société est à la traîne. En particulier sur les plus grands marchés automobiles d'Europe, la France et l'Allemagne, selon un nouveau rapport du groupe écologiste Transport & Environment (T&E). Les véhicules électriques à batterie représentent 14,1% des ventes des entreprises, contre 15,6% pour le marché privé. Pour la troisième année consécutive, les entreprises sont à la traîne, bien qu'elles disposent des ressources financières nécessaires pour passer aux véhicules électriques et qu'elles bénéficient de généreuses réductions d'impôts.
De grandes différences entre le privé et les sociétés
Dans l'UE, six nouvelles immatriculations sur dix sont des voitures de société. Parcourant deux fois plus de kilomètres que les véhicules privés, ces voitures de société représentent 74% de l'ensemble des émissions des voitures neuves. L'Allemagne et la France, qui représentent à elles deux plus de la moitié des nouvelles immatriculations de BEV dans l'UE, affichent les différences les plus marquées entre les entreprises et les particuliers.
En Allemagne, le taux d'adoption des BEV par les entreprises est de 16,3%. Ce chiffre est nettement inférieur aux 25,6% du secteur privé. En France, les taux d'adoption sont respectivement de 12% et 22,1%. Ces différences ne sont dépassées qu'au Danemark, où l'adoption de BEV par les entreprises accuse un retard de 27 points de pourcentage par rapport au marché privé (26,1% contre 53,1%).
L'année dernière, les entreprises ont immatriculé deux fois plus de grosses voitures (voitures des segments D, E, F et G) que les ménages (12% des nouvelles immatriculations contre 5%), comme le montre également l'enquête. Ce phénomène est particulièrement accentué en Allemagne: premier marché automobile d'Europe, l'Allemagne a immatriculé 40% de tous les véhicules lourds immatriculés dans l'UE.
Le marché ne tient pas la route
Les entreprises sont également à l'origine de l'essor des voitures hybrides rechargeables en Europe - des voitures dont il a été prouvé à maintes reprises qu'elles étaient tout aussi polluantes que les voitures à essence. D'ici à 2023, 77% de tous les nouveaux véhicules hybrides rechargeables immatriculés seront utilisés par les entreprises.
"Les entreprises devraient montrer l'exemple de la transition vers les véhicules électriques. Au lieu de cela, elles sont à la traîne par rapport aux ménages en matière d'électrification et immatriculent deux fois plus de grosses voitures. Pendant ce temps, les gouvernements subventionnent les voitures de société par de généreuses exonérations fiscales. Le marché ne tient pas la route et les incitations nationales existantes ne sont pas assez convaincantes pour faire du marché des voitures de société le leader vert qu'il devrait être. C'est pourquoi l'action de l'UE est non seulement justifiée, mais aussi indispensable", explique Stef Cornelis, directeur du programme de flotte électrique chez T&E.
L'étude montre que les véhicules de société pourraient devenir un moteur essentiel pour soutenir la transition industrielle verte des constructeurs automobiles européens. Le marché des véhicules de société représente la grande majorité des ventes de voitures de cinq des principaux constructeurs automobiles européens (Volvo, Volkswagen, BMW, Stellantis et Mercedes-Benz). 70% des ventes de voitures de VW dans l'UE sont des véhicules de société. En moyenne, seulement 49% des ventes des constructeurs automobiles non européens sont destinées au segment des entreprises.
Les conducteurs de voitures de société sont également plus enclins que les ménages à acheter des voitures électriques européennes, comme le montrent les données. 76% des voitures sans émissions sur le marché des entreprises sont vendues par des constructeurs européens, contre 65% sur le marché des particuliers. L'accélération de l'électrification des flottes de sociétés sera plus bénéfique pour les constructeurs automobiles européens que pour leurs concurrents, explique T&E.
Rôle de la Commission européenne
"La Commission européenne doit concevoir le cadre adéquat pour faire de l'Europe un leader mondial en matière d'électrification. C'est là que les objectifs en matière de véhicules électriques pour les flottes de société entrent en jeu.
Cet instrument de demande créera de la prévisibilité et apportera de la certitude aux constructeurs automobiles européens pour qu'ils continuent à augmenter leurs investissements dans la production de véhicules électriques et de batteries. Comme les constructeurs automobiles européens sont plus présents sur le marché des entreprises, ils bénéficieront davantage de cette mesure que leurs concurrents non européens", a déclaré M. Cornelis.
Avec l'ouverture de la consultation publique sur l'écologisation des voitures de société, l'Europe dispose d'une grande opportunité législative pour corriger le déséquilibre dans l'utilisation des véhicules électriques sur le marché des entreprises.
T&E appelle la nouvelle Commission européenne à proposer un règlement sur les flottes de voitures de société d'ici 2025, fixant des objectifs d'électrification de 100% pour les grandes flottes et les sociétés de leasing d'ici 2030. Les États membres devraient également réformer la fiscalité des voitures de société et encourager l'introduction de véhicules électriques en augmentant la charge fiscale sur les voitures polluantes à moteur diesel, à essence et rechargeables.
